Florilège gourmand fromages

Un Tour de France des Fromages Forts

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Fromage fort est un terme générique désignant un mélange de fromage, de vin blanc, d’alcool et d’aromates.

Le Larousse gastronomique donne du fromage fort cette définition : préparation  violemment sapide et odorante…

C’est avant tout une fabrication maison pour laquelle il n’existe pas de recette unique. D’aspect et d’odeur assez repoussant pour le non-initié, cette préparation fromagère est à l’origine de la fougne, un plat imaginaire apparaissant dans le film Les Bronzés font du ski.

Le fromage fort est une tradition fromagère qui se situe essentiellement dans le Sud-Est de la France, notamment en Rhône-Alpes et en Provence-Alpes-Côte d’Azur, dans les départements de la Drôme, de l’Ain, de l’Ardèche, des Alpes-de-Haute-Provence, des Alpes-Maritimes, des Bouches-du-Rhône, des Hautes-Alpes, de l’Isère, de la Savoie, du Var et de Vaucluse, ainsi que dans les départements du Pas-de-Calais et de l’Orne et en Bourgogne.

Elle est encore de nos jours une tradition familiale très ancrée. De fait, il est très difficile de trouver sur le marché de bons et véritables fromages forts car sa recette est multiple et son goût comme l’indique son nom très fort.

Leur origine tient surtout à la nécessité de revaloriser, dans un but d’économie, un fromage raté, un reste domestique, ou le sous-produit de la fromagerie, en conservant ses nutriments essentiels. Ces fromages, parfois appelés la « viande du pauvre » servaient à « faire manger du pain ».

C’est un plat populaire consommé par les travailleurs : paysans de plaine et de montagne, ouvriers, mineurs de fond, canuts,

 C’est pourtant l’un des fromages les plus emblématiques de la gastronomie française.

Voici, un Tour de France des fromages forts élaborés dans les régions, à découvrir :

 

Bosson macéré

bosson

Le bosson macéré est élaboré dans les départements des Bouches-du-Rhône et de l’Ardèche.

C’est une préparation paysanne traditionnelle dans les régions du Vivarais (fromage de chèvre) et de la Crau (fromage de brebis), faite à base de restes de fromage, de vin, d’eau-de-vie et d’aromates.

L’existence de cette préparation fromagère portant le même nom  dans deux régions non voisines est le résultat d’une antique transhumance.

On se sert de tommes de chèvre ou de brebis sèches ou défraîchies, de restes non consommés ou invendus, ainsi que de produits ayant connu des accidents de fabrication. Il y est rajouté de l’eau-de-vie de marc et du vin blanc. Les aromates les plus utilisés – variables selon le lieu de production sont : l’ail, les oignons, le poivre, les herbes aromatiques, les épices et l’huile d’olive.

Après un mois passé dans une cave fraîche, on broie le tout pour former la pâte et on rebouche le pot pour deux mois.

Les fromages sont une crème dont on fait des tartines que l’on consomme sur place.

Brous ou cachetti

brous

Le brous est une préparation fromagère typique des départements des Alpes-Maritimes et du Var.

Dans le Haut Pays Niçois, à la limite des Alpes-de-Haute-Provence, l’élevage montagnard depuis des siècles a permis de produire des fromages grâce à l’abondance du lait des troupeaux de vaches, de brebis et surtout de chèvres qui y séjournaient à l’estive. Mais ces tommes se conservaient mal.

Les bergers ou leur famille confectionnaient alors, pour pas perdre, avec ces produits laitiers invendables un redoutable fromage : le brous ou cachetti.

Le brous est donc historiquement le fromage des bergers. Il est encore de nos jours fabriqué dans les villages de l‘arrière pays niçois.

Il est préparé avec :  tommes du Haut Pays Niçois qui se conservent mal, caillé, branda (marc de Provence), gousses d’ail hachées, poivre…

Cachaille ou cacheille ou catcha ou fuorte ou toupina

cachaille

La cachaille est originaire du sud-est de la France et plus spécialement de la région de Provence

Cette préparation fromagère était initialement une fabrication familiale où chaque foyer avait sa méthode d’élaboration. Les premières références à ce fromage viendrait du village de Puimichel dans les Alpes provençales. Les habitants de Reillanne, connus pour leur esprit d’économie, portaient le sobriquet moqueur de mangea-cacheïo (mangeurs de cachaille), ce qui laissait à penser qu’ils se nourrissaient uniquement de tommes sèches fermentées.

La diffusion géographique de cette préparation fromagère lui a fait adopter différentes dénominations. Elle se nomme cacheille, au pied de la montagne de Lure, catcha dans le Haut-Verdon, fuorte dans le Queyras et toupina dans le Briançonnais.

Elle est élaborée à base de Tomes et brousses de chèvre ou des restes de fromages divers auxquels on ajoute eau-de-vie, vin blanc, vinaigre, oignon, ail, huile d’olive, sel et poivre.

Cachat

cachat

Le cachat est une préparation fromagère traditionnelle autour du Mont Ventoux, généralement fabriqué à base de lait de chèvre, de lait de brebis ou d’un mélange des deux. Afin d’élaborer le cachat, on fait aigrir du lait caillé dans un grand pot de grès (environ 10 litres) et on élimine au fur et à mesure le petit lait, on y rajoute du fromage persillé pour accélérer la fermentation et rasade d’eau-de-vie.

Cette mixture se transforme alors en une crème onctueuse au goût puissant, s’amplifiant avec le vieillissement. Le cachat, suivant les régions provençales, figure parmi les treize desserts de Noël.

C’était aussi un mets courant puisque il se mangeait autrefois au casse-croûte du matin ou délayé en sauce sur des pommes de terre en robe des champs. Le plus souvent, les paysans et les bergers le consommaient tartiné sur d’épaisses tranches de pain grillé qui avaient été poivrées et s’accompagnaient d’oignons crus. Cette recette fromagère demande un certain entretien, on dit que le cachat s’alimente.

Après chaque ponction, il y est ajouté, au fur et à mesure, une quantité équivalente de fromage fait, sous forme de restes coupés ou râpés. Il faut aussi remettre de temps en temps un peu d’alcool. Si le mélange a tendance à devenir trop épais ou trop fort, il est nécessaire d’y rajouter un peu de fromage frais ou de lait. De plus, il est impératif de remuer et de touiller régulièrement la préparation pour la garder homogène.

Casgiù merzu ou casgiù mezzu ou casgiù marzu

Casgiù merzu

Le casgiù merzu ou casgiù mezzu ou casgiù marzu, est une préparation fromagère corse. Contrairement aux autres fromages forts élaborés sur le continent, cette préparation n’est pas faite à base de restes de fromages mais de tommes dans lesquelles se sont développés des asticots. Littéralement casgiù merzu signifie fromage pourri.

Pour élaborer cette préparation fromagère, on part de tommes de brebis ou de chèvre qui sont laissées à mûrir dans un lieu aéré et ouvert aux mouches. Celles-ci y pondent leurs œufs. Devenus larves, ces petits vers vont se nourrir du fromage. Les amateurs disent que le fromage marche tout seul, grâce à ses asticots. C’est alors qu’l est dit fromage pourri et sa consistance ressemble au cachat. Il est conservé en bocal ou petit pot de terre. Il a le goût d’un roquefort bien avancé. En théorie, le casgiù merzu ne se transporte pas.

Il se consomme de deux façons : soit quand les vers sont encore dedans, soit une fois que les vers sont partis. Pour faire fuir les asticots, la préparation est plongée dans l’eau de vie. Il se mange tartiné sur du pain grillé, généralement sur un poêle à bois, et quand il fait très froid. Ce fromage se fabrique en toutes saisons sauf en hiver, il se trouve facilement en Corse du sud. Il ne doit théoriquement pas être commercialisé car, bien sur, il échappe aux normes européennes d’hygiène.

Confit d’Époisses

confitdepoisse

Le confit d’Époisses est une spécialité fromagère de Bourgogne élaborée à base du fromage d’époisses. Il tire son nom de celui du village dÉpoisses.

Fabriqué avec du lait de vache, ce fromage, avec son odeur puissante et son goût de sel prononcé est l’un des plus forts fromages à croûte lavée. Cela est dû au processus de lavage de la croûte qui se fait au marc de Bourgogne.

L’époisses rappelle qu’autre fois, à la campagne on se nourrissait souvent de pain et d’un morceau de fromage. Il avait une odeur si puissante qu’elle donnait du goût au pain et quand il devenait vraiment trop fort, c’est-à-dire immangeable, le vieux fromage était transformé en confit.

Pour ce faire, il est râpé puis mis à macérer dans un bourgogne blanc additionné de marc du pays.

Après une période de maturation d’environ trois semaines, il devient crémeux et commence à prendre une saveur plus douce. Il se mange alors tartiné sur du pain.

Coussignous

coussignous

Le coussignous est originaire du Var. Cette préparation fromagère est caractérisée par sa forte expression gustative et odorante.

  Ce fromage est appelé aussi couient (cuisant) parce qu’il brûlait la bouche.

Fort de Béthune

fortdebethune

Le fort de Béthune est élaboré dans le département du Pas-de-Calais.

Il est né au XIXe siècle, il servait alors de casse-croûte aux mineurs, une pratique qui perdura jusqu’au début du XXe siècle.

Qualifié de fromage du pauvre ou viande du pauvre, il connut son heure de gloire aux temps où les bassins houillers du Nord tournaient à plein régime. Il a été vraisemblablement popularisé par des mineurs venus de Lorraine. Cette préparation fromagère était alors uniquement domestique et était élaborée essentiellement en automne et en hiver.

Il est à souligner que cette préparation fromagère n’est en rien l’héritière des renommés fromages médiévaux de Béthune.

Cette préparation nécessitait de restants de fromages malaxés, essentiellement des maroilles, du vin blanc, de l’eau-de-vie, des épices, dont cumin et poivre et du beurre.

Foudjou

foudjou

En Drôme et en Ardèche, le foudjou est élaboré à base de fromage frais de chèvre et de picodon perdu. Il faut râper les fromages secs et écraser les frais à la fourchette.

Mais en campagne, la maturation du fromage peut durer jusqu’à un an. La préparation est parfois servie mélangée à du fromage frais, sur de larges tranches de pain de campagne. La quasi majorité des fromages sont dégustés avec du vin, mais quelques-uns comme les fromages forts se révèlent parfaits mariés aux single malts.

Le foudjou peut être associé avec The Glenlivet, de 12 ans d’âge, un single malt du Speyside classique ou tout autre whisky de la même classe.

Fourmagée

fourmagée

La fourmagée est originaire et élaborée dans le Perche ornais. Elle est faite à base de fromages de vache locaux, de cidre avec ajout d’herbes aromatiques, d’épices et d’oignons.

Cette préparation fromagère est citée par Jérôme Cardan, milanais d’origine, en 1642, dans son recueil consacré à ses Livres de Hierosme Cardanus, sous le nom de fourmagée.

Cette préparation autrefois très spécifique au département de lOrne, était désignée sous les termes de fourmagée, froumagée, fourmaigée.

Fromage fort de la Croix-Rousse

fromage fort de la Croix-Rousse

Le fromage fort de la Croix-Rousse est originaire de Lyon et plus spécialement du quartier de la Croix-Rousse . Il est connu et consommé en Lyonnais, dans les Dombes et en Beaujolais.

Il doit son nom aux bouchons, restaurants lyonnais de la Croix-Rousse , où les habitués le consommaient au comptoir. C’était surtout le fromage des canuts qui en mangeaient chez eux du matin au soir.

 Les matières premières à utiliser semblent assez variables bien qu’il existe un corpus commun donné par Jean Froc.

Certains préconisent un assemblage de fromages bleus et de chèvre ayant fortement vieillis, qui sont écrasés et mélangés avec du vin blanc, du sel, du poivre, du levain et gardé en pot toute une année.

D’autres partent d’un bouillon de poireaux, dans lequel vont être râpés des vieux fromages de chèvre et de de vache, du gruyère, le tout étant ensuite mêlé et malaxé avec du fromage de vache égoutté , du levain de fromage fort, du vin blanc sec et du beurre.

Metton

metton

En Franche-Comté, le metton, un fromage maigre chauffé et cuit comme le gruyère. Râpé, il est mélangé avec du beurre et un peu d’eau salée jusqu’à l’obtention d’une crème, la cancoillotte, que l’on peut agrémenter d’ail, d’échalote, de vin blanc, de vin jaune, de beurre.

Miromando

miromando

 La miromando est originaire de l’Ardèche. C’est une vieille préparation fromagère des Monts du Vivarais et des Boutières.

 La production de fromages et les préparations fromagères vont du picodon, au foudjou et à la miromando, en passant par le sarasson, à base de babeurre.

Il est fabriqué à base de petit-lait chauffé et égoutté dans un sac en toile, donnant un caillé moulé en boulettes, séchées puis écrasées, on y ajoute de l’eau-de-vie, du sel, du poivre, parfois du beurre et de la moutarde.

Pétafine ou  petafine ou p’tafine 

pétafine

La pétafine est une production fromagère du Dauphiné, élaboré dans les départements de la Drôme et de l’Isère.

La pétafine ou petafine ou p’tafine, est le nominatif de pétafiner qui signifie malaxer.

L’origine de ce mot est lyonnaise, mais la recette provient du pays de Voiron, dans le massif de la Chartreuse. Elle est élaborée à base de : restes de fromages, eau-de-vie ou/et vin blanc, vinaigre, ail, mais aussi parfois levain, sel, poivre, bouillon de poireau, raisins secs, huile d’olive ou huile de noix, muscade, thym, sarriette, anis.

Il faut au préalable malaxer (pétafiner) ces fromages avec « une pâte obtenue en ramollissant du fromage sec et fort dans du lait chaud ».

Ensuite sont ajoutés et mélangés les autres ingrédients. Les dauphinois assurent que leur pétafine peut être consommée fraîche et immédiatement. Quant à eux, ils la laissent mûrir et vieillir assez longtemps. La pétafine se consomme étalée sur des tartines.

Pourri bressan

pourri bressan

Le pourri bressan est élaboré dans le département de lAin, en Bresse.

En fait, les Bressans s’autorisent une grande liberté dans la fabrication, ce qui permet de multiples variantes.

Comme l’indique sur son site un gastronome averti :  Le pourri bressan ne peut se passer de crème fraîche qui est ajoutée à la préparation.

Certains ne résistent pas à ajouter aussi du vin blanc, du marc et parfois d’autres alcools… ainsi que des épices. En la matière, il n’y a pas de règles. ».

Rebarbe

Rebarbe

La rebarbe de l’occitan rebarba, est une sorte de fromage fermenté à base de lait de brebis produit dans le Gévaudan, les départements de l’Ardèche, l’Aveyron, le Gard, l’Hérault et la Lozère, et réservé à l’usage familial.

Dans les caves de Roquefort, on enlevait les barbes (efflorescences) à la surface des fromages en cours de maturation. La partie enlevée formait la « rebarbe » qui se présentait sous forme pains cylindriques.

En Gévaudan, elle était élaborée avec du petit lait provenant du beurre et celui de la fermentation de la tome. Le fromage obtenu était coulant et d’odeur très forte.

Parfois on laissait fermenter la rebarbe en enfouissant le térou (pot de grèssous un tas de foin, ce qui donnait un fromage coulant et d’odeur très forte; genre de cancoillotte.

Dans le Rouergue, et particulièrement à Compeyre, importante commune viticole avant le phylloxéra, cette préparation fromagère se faisait en malaxant des vieux roqueforts dans de l’eau-de-vie. Le vin local accompagnait la dégustation de ce fromage fort.

Tomme forte de Savoie

tomme forte de Savoie

La tomme forte de Savoie est originaire des hautes vallées savoyardes. Cette préparation fromagère s’élabore dans une toupine et en prend quelques fois le nom. Ce fromage originaire de la Savoie est fabriqué dans les vallées de la Tarentaise, de la Maurienne et dans la Combe de Savoie.

Un des grands centres de production fut la commune de Laissaud.

La tomme, doyenne des produits fromagers de Savoie, fut primitivement un fromage élaboré pour utiliser le lait écrémé, reliquat de la fabrication du beurre. Elle était uniquement consommée dans les alpages et dans les chalets. Ses origines paysannes explique son apparence rustique.

Destinée à une consommation quotidienne et familiale, la tomme de Savoie n’était connue et vendue que sur quelques marchés locaux.

Dans une économie de pénurie, pour ce faire, ils étaient mis à fermenter dans une toupine (toupina).

Cette préparation fromagère nécessite de vielles tommes de vache ou à défaut des vieux fromages de chèvre , du fromage blanc pressé ou caillé, du bouillon de poireaux, du sel et du poivre.

Tracle ou tracle du Bugey

tracle du Bugey

La tracle ou tracle du Bugey est un fromage fort élaboré dans les départements de l’Ain et de la Savoie.

Cette spécialité fromagère permet un recyclage des restes de fromage et l’élaboration d’un met relevé dégusté en fin de repas. Elle se retrouve aussi dans certains cantons de Savoie.

Le plus généralement elle est fabriquée à partir de caillé de vache (fromage frais) auquel s’ajoutent des restes de fromages locaux, du vin blanc du Bugey, du marc du Bugey ou de l’absinthe en Savoie, du bouillon de poireaux et divers aromates. Les proportions ne sont pas très précises. Certains font leur préparation en privilégiant la consistance crémeuse, d’autres avec leurs restes de fromages pour éviter qu’ils ne se perdent.

Il peut donc y entrer des croûtes de fromage crémeux mêlées à celles de fromages à pâte cuite et à pâte dure, des restes de vieux fromages secs locaux : tomme du Bugey, Beaufort, gruyère, crottin, fromage blanc en faisselle…

 Mais le but recherché pour l’élaboration de cette préparation fromagère reste le même : faire refermenter des vieux fromages avec du fromage frais, de l’eau-de-vie, du vin blanc et du bouillon de poireaux. Elle se consomme sur une tartine de pain, parfois passée au four.

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