Si Paris se caractérise aux yeux de la majorité de ses visiteurs pour ses édifices haussmanniens, ses grands monuments et ses nombreuses églises, la capitale regorge également d’édifices plus insolites qui font appel aux cultures moyen-orientales, aux tournures arabisantes et aux techniques venues de la période maure de la péninsule Ibérique.
On part aujourd’hui à la découverte des plus belles constructions mauresques et néo-mauresques de Paris.
De façon plus surprenante, des immeubles d’habitation disséminés par-ci par-là en plein Paris nous donnent un petit goût d’Orient sans jamais jurer parmi les immeubles haussmanniens.
Tous ont été construits ou rénovés à la fin du XIXe siècle, à l’époque où la mode orientaliste affolait la société parisienne.
Les immeubles à influence mauresque disséminés dans la capitale, voici un petit inventaire, à découvrir :
Anciens bains turcs
Les Anciens bains turcs du 18 rue des Mathurins 75009, dont la sublime façade néo-mauresque nous est restée, les architectes William Klein et Albert Duclos construisent en 1876 les bains turcs parisiens dans un style néo-mauresque.
Le quartier n’est pas non plus choisi au hasard : l’Opéra Garnier, situé au bout de la rue des Mathurins, a été inauguré en 1875. C’est le cœur de la vie mondaine à Paris.
Dès leur ouverture, les bains turcs sont fréquentés par la meilleure société, où se mêlent aristocrates, grands bourgeois et hommes politiques. Léon Gambetta, le baron Haussmann, le duc d’Aumale, le duc de Montpensier, le prince de Galles, le baron de Rothschild sont cités comme clients sur un prospectus qui en fait la publicité.
Le lieu offre un ensemble de services haut de gamme dans un luxueux décor : hammam, hydrothérapie, massages, piscine, salons de repos, restaurant, salon de coiffure. On vante la qualité de sa cave et de ses cigares.
L’établissement (non mixte) est essentiellement fréquenté par les hommes, même si certains jours, les femmes peuvent s’y rendre en empruntant une porte plus discrète au n°47 boulevard Haussmann.
Les bains turcs ferment leurs portes en 1954. Le décor intérieur a été entièrement détruit lors de la rénovation de l’immeuble. Seule la façade a conservé son style mauresque avec frises, colonnettes, arcs et garde-corps inspirés des moucharabiehs.
Ancienne École nationale de la France d’outre-mer
Un des derniers bâtiments parisiens de style néo-mauresque (fin XIXe siècle) est situé au 2 rue de l’Observatoire 75006.
Subsistent de cette époque les formes architecturales des toits, des façades et des ouvrants, les fresques et mosaïques du patio intérieur avec son jardin ainsi qu’une splendide bibliothèque aux murs entièrement sculptés.
Du temps où ce lieu abritait l’École coloniale, on notera douze peintures murales représentant l’outre-mer en 1912.
Le bâtiment abritera par la suite l’IHEOM (Institut des Hautes Études d’Outre-Mer) puis l’IIAP (l’Institut International d’Administration Publique).
Enfin, c’est aujourd’hui le troisième site de l’ENA (École Nationale d’administration) avec, notamment, sa direction des relations internationales. L’édifice vient d’être entièrement rénové.
L’ancienne École nationale de la France d’outre-mer est devenue, sous l’impulsion de De Gaulle en 1966, l’Institut international d’administration publique qui fut par la suite absorbé par l’École nationale d’administration en 2002.
L’architecture de ce bâtiment, de style néo-mauresque, est l’un des rares témoins parisiens de l’histoire colonialiste française : en ces murs se trouvait l’école coloniale qui avait vocation à former les dirigeants et administrateurs des colonies françaises.
L’architecte choisi pour la construction de l’établissement en 1885, Maurice Yvon, fut tout au long de sa carrière fortement influencé par le style oriental, tout comme l’était son père, Adolphe Yvon, peintre orientaliste.
Il avait ainsi réalisé, deux ans plus tôt, le pavillon français de l’Exposition universelle de Chicago, d’inspiration annamite et tunisienne.
Dans les années 1970, il a été décidé d’effacer les lourds vestiges colonialistes de l’école ; ainsi, les fresques à la gloire des colons furent évincées et la plupart des portes-fenêtres arrondies.
Il n’en demeure qu’aujourd’hui encore se mêlent aux peintures impressionnistes des croissants musulmans, des écritures stylisées façon calligraphie arabique, des mosaïques de céramiques et une cour intérieure ressemblant fortement à un patio andalou.
Ce bâtiment montre bien la façon dont l’influence orientale était perçue et reprise par le Tout-Paris de la fin du XIXe siècle.
Grande Mosquée de Paris
La Grande Mosquée de Paris est une mosquée française de style mauresque avec un minaret de 33 mètres.Elle est située 6 rue Georges-Desplas 75005 dans le quartier du Jardin-des-Plantes.
La mosquée, inaugurée le 15 juillet 1926, a été fondée par Si Kaddour Benghabrit. Elle a une place symbolique importante pour la visibilité de l’islam et des musulmans.
Si elle a été érigée en hommage aux soldats musulmans morts pour la France durant la Première Guerre mondiale, un projet de construction existait déjà longtemps auparavant, dès la fin du XIXe siècle.
Installée à deux pas du Jardin des Plantes, la grande mosquée est principalement connue pour son impressionnant minaret de 33 mètres ainsi que ses influences hispano-mauresques, nous transportant presque jusqu’en Andalousie.
Son véritable trésor, à ne surtout pas manquer, est sans doute son patio, resplendissant au coeur de Paris comme une oasis dans le désert.
Institut du monde arabe
L’Institut du monde arabe (en abrégé « AWI »; en français : Institut du Monde Arabe , en abrégé « IMA ») est une organisation fondée à Paris en 1980 par 18 pays arabes avec la France pour rechercher et diffuser des informations sur le monde arabe et ses aspects culturels et spirituels.
L‘immeuble a été construit de 1981 à 1987 et a une superficie de 16 894 m ².
L’ Architecture-Studio avec Jean Nouvel , a remporté le concours de design 1981.
Ce projet est le résultat de fonds provenant à la fois de la Ligue des États arabes et du gouvernement français, le coût du bâtiment s’élevant à environ 230 000 000 €.
Le bâtiment fait office de zone tampon entre le campus Jussieu de l’Université Pierre et Marie Curie (Paris VI), construit en grands blocs urbains rationalistes, et la Seine.
Visible derrière la paroi vitrée, un écran métallique se déplie avec des motifs géométriques en mouvement.
Les motifs sont en fait 240 ouvertures ou volets photosensibles contrôlés par moteur, qui agissent comme un brise-soleil sophistiqué qui s’ouvre et se ferme automatiquement pour contrôler la quantité de lumière et de chaleur pénétrant dans le bâtiment par le soleil.
Le mécanisme crée des espaces intérieurs avec une lumière filtrée,un effet souvent utilisé dans l’architecture islamique avec ses stratégies climatiques. L’utilisation innovante de la technologie et le succès de la conception du bâtiment ont propulsé Nouvel à la renommée et sont l’un des points de référence culturels de Paris.
Maison look hispano-mauresque
Une maison à l’architecture surprenante !
Elle se situe au 17 rue des Bernardins 75005 dans le quartier Latin, pas loin de la Seine et de Notre-Dame.
Elle abrite aujourd’hui l’URFIST (Unité régionale de Formation à l’Information scientifique et technique) de Paris.
Construite en 1890 par l’architecte Jean-Marie Broussard, elle a eu droit à un look hispano-mauresque et à une couleur rare à Paris : le gris !
Á remarquer la forme des arcades de la loggia au dernier étage, ainsi que les balcons en fer forgés et leurs dessins compliqués, presque floraux, voire pré-art-nouveau.
Á observer, les ouvertures au rez-de-chaussée ont toutes des tailles différentes !
Maison du Maroc de la Cité universitaire
La Maison du Maroc, située 1 boulevard Jourdan en plein coeur du parc de la Cité internationale 75014, a vu le jour à l’initiative du roi Mohammed V et a ouvert ses portes en 1953.
De prime abord, son architecture est typique des années 1950 et n’a rien de traditionnelle ; cependant, ses premiers architectes ont pris soin d’y intégrer certains détails relevant de l’architecture marocaine, à l’image de ses somptueuses toitures en tuile vernissée qui valent le détour.
Ce savant mélange de styles s’est affiné tout au long des rénovations successives de la Maison.
Aujourd’hui, on peut y admirer un sublime patio andalou réalisé par André Paccard, alors directeur des bureaux techniques du palais royal au Maroc, en 1982, une porte monumentale traditionnelle ou encore un véritable salon marocain.